Si vous avez reçu un diagnostic de grossesse molaire, il est important de retenir qu’il y aura rarement développement d’un cancer et que même si un cancer se développe, les chances de guérison sont généralement très élevées.

Le diagnostic d’une maladie trophoblastique tombe, le plus souvent, au moment d’un examen de grossesse, lors de l’échographie ou lors d’une consultation pour des saignements alors que vous êtes en âge de procréer.

Quand tout bascule…

Vous êtes enceinte de plusieurs semaines et vous l’avez peut-être déjà annoncé à vos (très) proches, quand tout à coup… tout bascule.  Les résultats de vos prises de sang dont le test de grossesse révèlent que votre grossesse est anormale, ou même déjà terminée et qu’il va falloir vous faire un curetage.  Le diagnostic (toujours basé sur la pathologie) tombe comme une sentence : vous avez une maladie trophoblastique.

Tout se passe tellement vite que vous n’avez pas le temps de comprendre ce qui vous arrive. Qu’est-ce qu’une maladie trophoblastique ?

Alors, voici quelques informations pour vous aider à mieux comprendre en quoi consiste cette maladie.

Le trophoblaste est la couche de cellules à l’origine du  placenta. On emploie ce terme pour parler du placenta au début de la grossesse. Une maladie trophoblastique est donc une maladie du placenta, liée à la grossesse mais pas à l’embryon même si ce dernier est aussi concerné. Soit il est absent (môle complète), soit il est anormal (môle partielle), il n’y a donc aucune survie possible pour le projet de grossesse.

Môle complète ou môle partielle ?

Ce sont les deux formes les plus fréquentes de cette maladie.

Une môle complète consiste en une grossesse anormale sans embryon : au moment de la fécondation, le spermatozoïde a fécondé un ovule qui a perdu son contenu (œuf clair). Le spermatozoïde s’est en même temps dédoublé de manière accidentelle et sans raison connue. On se retrouve donc avec un matériel composé d’un spermatozoïde dédoublé et d’un ovule vide. Ce résultat de conception est anormal et non viable. Il devient même potentiellement dangereux pour la mère si cette grossesse anormale se poursuit.

La fonction du spermatozoïde à ce stade de la grossesse débutante est de faire du placenta, pendant que l’ovule devrait « construire » un embryon. Or, le signal d’alarme qui dirait au placenta de s’arrêter, puisqu’il n’y a pas d’embryon, ne fonctionne pas. La femme se retrouve à produire un placenta anormal et augmenté en taille, sans aucun embryon. Dans ce cas, le seul moyen d’arrêter le processus est de faire un curetage (une chirurgie mineure, de courte durée pour retirer les tissus qui doivent être éliminés).

Il faut savoir que dès les premiers jours de grossesse, les cellules du placenta produisent une hormone, le ßhCG (Beta-hCG ou hormone de grossesse). Avec un matériel augmenté, on accroit également la production du ßhCG, ce qui se traduit souvent par une perception accrue de la grossesse (signes secondaires tels que les nausées, la fatigue, les seins douloureux, etc.). Pourtant, comme il n’y a pas d’embryon, cette grossesse n’a aucun avenir. Elle doit être interrompue chirurgicalement aussi vite que possible. Une analyse pathologique doit être demandée en urgence pour prouver le diagnostic. Ensuite, un suivi strict du ßhCG doit être fait chaque semaine jusqu’à son retour à la normale (< 5). Ce suivi se fait à l’aide d’une simple prise de sang.  Sa durée varie selon le temps que prend le ßhCG pour revenir à la normale. La plupart du temps il durera de 4 à 6 mois après le curetage. Pendant ce laps de temps, il vous sera recommandé de ne pas tomber enceinte (contraception reconnue, orale de préférence) pour éviter une confusion entre la remontée anormale du ßhCG et celle du début d’une grossesse.

Une môle partielle est une grossesse anormale avec embryon. Au moment de la fécondation, de manière accidentelle et sans raison connue, deux spermatozoïdes fécondent en même temps le même ovule. Lors de la première échographie (celle qui sert à dater la grossesse), il y a généralement un embryon, avec parfois un petit cœur qui ne bat plus. (Certaines échographies précoces peuvent observer un cœur battant mais la répétition de l’examen quelques semaines plus tard le découvre souvent arrêté).  On pense alors à une fausse-couche et on procède à son évacuation, soit à l’aide de médicaments, soit à l’aide d’une chirurgie. C’est seulement suite au curetage que les médecins pourront diagnostiquer une môle partielle avec certitude.

Idéalement, un suivi du ßhCG devrait avoir été fait. Si tel n’est pas le cas, en particulier si votre médecin ne se doutait pas d’une grossesse anormale, il vous demandera de faire une prise de sang au moment de vous rencontrer pour vous donner le résultat de la pathologie. Si le résultat est encore positif, vous devrez  continuer les prises de sang jusqu’à ce que la valeur du ßhCG soit normale (soit < 5). Cette analyse et ce suivi sont importants, car, bien que très rares (0,5%), les risques existent de voir remonter le ßhCG par une production anarchique (incontrôlée) des cellules du placenta, malgré un curetage efficace et soigné. C’est à ce moment qu’un diagnostic de cancer sera posé (néoplasie gestationnelle trophoblastique).

Cancer du placenta

Le cancer du placenta, ou néoplasie gestationnelle trophoblastique, survient lorsque la descente naturelle du ßhCG s’arrête et que la valeur de l’hormone de grossesse remonte sur 3-4 semaines de suite. Ce risque est de 15-20 % pour les môles complètes et de 0,5-1 % pour les môles partielles (le diagnostic pathologique doit avoir été confirmé).

Une prise en charge spécialisée en oncologie est alors à prévoir afin d’intervenir le plus rapidement possible, comme dans les tous les cas de cancer. Si vous êtes concernée par un tel diagnostic, vous passerez des examens radiologiques (scan et résonance magnétique) dans le but de préciser l’étendue de la maladie. Un traitement complémentaire (chimiothérapie, chirurgie) vous sera alors proposé.

Mais rassurez-vous, les chances de guérison sont globalement de 98,5 %. De plus, chez la majorité des patientes, la fertilité reste intacte après la fin du suivi, soit 1 à 2 ans après les traitements selon le stade de la maladie, sans augmentation décrite des risques de fausses-couches, de prématurité ou de malformations.

Môle invasive

Dans de rares cas, on parle de môle invasive ou de choriocarcinome. Si vous avez eu des saignements, une prise de sang avec un taux de ßhCG particulièrement élevé, ou que vous avez vécu un avortement, une fausse-couche, une naissance ou éventuellement une grossesse molaire, le diagnostic de môle invasive sera confirmé après une biopsie ou une chirurgie.

Ce type de cancer rare implique une prise en charge spécialisée en milieu oncologique. Et tout comme pour le cancer du placenta, si vous recevez un diagnostic de choriocarcinome, vous passerez des examens radiologiques (scan et résonance magnétique) dans le but de préciser l’étendue de la maladie. Un traitement complémentaire (chimiothérapie, chirurgie) vous sera alors proposé. De manière générale, ces maladies sont bien contrôlées et répondent aux traitements. Par contre, la fertilité peut être affectée.

Cas très rares

Les tumeurs du site placentaire comme la tumeur trophoblastique du site placentaire ou PSTT, et la tumeur trophoblastique épithélioïde ou  ETT, sont deux cancers particulièrement rares (seulement 1 à 2 cas par an au Québec). Ils se présentent différemment et ne réagissent pas comme les maladies précédemment décrites. Ils sont issus d’une couche particulière du placenta (cellules intermédiaires) pour lesquelles la production de ßhCG n’est pas aussi typique que pour les grossesses molaires. Les symptômes classiques de ce type de cancer seraient un saignement discret mais persistant ou un ßhCG moyennement élevé (< 100) ou un test de grossesse positif découvert fortuitement lors d’un examen de routine. Autrement dit, vous n’êtes pas enceinte mais l’avez été un jour et votre enfant a peut-être déjà quelques années maintenant. Ce cancer rare peut être confirmé par un curetage ou une biopsie, et une prise en charge en oncologie spécialisée (gynéco-oncologie) s’imposera dès lors.

De cas en cas, la situation sera évaluée et discutée au mieux des connaissances acquises à ce jour et souvent, en ayant recours à une collaboration internationale, pour offrir de meilleures chances de guérison, compte-tenu du peu de femmes aux prises avec ces maladies.

Nous espérons que ces informations vous auront permis de mieux comprendre les maladies trophoblastiques et leurs impacts.

Si vous avez besoin de plus amples renseignements sur le sujet, sachez que depuis 2009, il existe au Québec un registre (RMTQ.ca) pour documenter ces maladies rares et accompagner les équipes soignantes qui le désirent.

De plus, toutes les patientes, qui ont reçu un diagnostic de maladie trophoblastique, inscrites sur ce site bénéficient d’informations et d’un suivi personnalisé.

Votre médecin peut également vous informer sur ce programme de la Direction générale de cancérologie au Québec.

Il est normal de se sentir déprimée ou triste après un diagnostic de maladie  trophoblastique. N’hésitez pas à en parler à votre équipe de soins ou à contacter le Réseau des Maladies Trophoblastiques du Québec si cette situation perdure. (RMTQ.ca)

Avec la collaboration de Magali Breguet, infirmière coordonnatrice et IPO au CHUM.


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